Pas une mince affaire de fédérer des producteur·ice·s électro qui se la joue solo. Ce collectif s’en est chargé avec brio et s’est imposé comme un acteur qui compte dans la capitale.
Toute personne qui s’intéresse un tant soit peu à la musique électronique en Belgique a déjà au moins entendu parler du Brussels Electronic Marathon (BEM). Ce festival qui investit des dizaines de lieux parfois insolites de la capitale a déjà connu trois éditions, mais il n’est en fait que la face émergée de l’iceberg d’un collectif qui se démène depuis des années pour promouvoir la richesse de la scène électro à Bruxelles : FTRSND (prononcé « Future Sound »). Brise Deloose, co-fondateur et qui est maintenant programmateur au Fuse, club mythique de la vie nocturne bruxelloise, se souvient de comment tout a commencé : « À la base, avec Olivier Colot, on trouvait qu’il y avait un manque de visibilité et de force au niveau de la scène locale pour les musiques électroniques ».
« On a fait une série d’interviews avec une quarantaine de producteur·ice·s bruxellois·e·s pour voir comment iels voyaient leur position dans l’écosystème musical. Quels étaient leurs enjeux et leurs galères. À notre grande surprise, ils se plaignaient systématiquement de se sentir seul. Contrairement à un groupe de rock, par exemple, ou il y a un projet commun et du partage, etc., la vie de l’artiste électro s’accompagne d’une espèce de solitude. Iels composent seuls dans leur chambre et ne savent souvent pas comment trouver des dates et où envoyer leurs compos. »
Les deux amis ont donc joué les psychologues de service en organisant des drinks chez eux lors desquels ils invitaient des connaissances du milieu à se rassembler et boire des bières. « On s’est demandé « ensemble, qu’est-ce que nous on a envie de faire ? ». Il y a différents projets qui ont émergé de ce collectif et c’est comme ça qu’on a lancé notre site web et qu’on a commencé à organiser des événements. »
La première soirée FTRSND au Fuse a eu lieu le 13 décembre 2014. « On a choisi ce nom parce qu’on croyait d’une certaine manière que le son qu’on fait aujourd’hui est celui de demain. Dans l’idée initiale, on croyait en des artistes et un projet avec lequel on allait avancer. Il y avait une notion d’ouverture sur l’avenir et de voir la lumière au bout du tunnel. Quant aux lettres capitales, c’est con, mais c’était une question pragmatique de référencement sur le web. Mais c’est aussi plus facile à retenir et plus interpellant ! » Le collectif compte aujourd’hui une soixantaine de membres, des artistes mais aussi d’autres personnes avec des compétences diverses, comme des graphistes ou des personnes qui se chargent de faire la promo.
Si la sauce a pris aussi rapidement c’est aussi parce que le terreau bruxellois a toujours été propice au développement de scène électro. « Bruxelles est clairement un centre européen de la musique électronique. C’est une capitale d’Europe centralisée, plein de gens transitent par ici. Ensuite, la Belgique a historiquement été un pays qui a toujours été envahis par des puissances étrangères. Du coup, on a un capital de richesses culturelles important et diversifié. Par rapport à une ville comme Berlin où tout le monde fait de la techno, Bruxelles a aujourd’hui pu trouver sa place sur la carte parce que les frontières entre les genres de musiques électroniques s’éclatent et se confondent. » L’évolution des mœurs et des mentalités y est aussi pour quelque chose : « Jusqu’il y a peu, le Belge manquait parfois de confiance en soi et en ses artistes. Aujourd’hui, j’entends des gens dire : « Je suis Bruxellois et j’en suis fier ». Cette fierté s’est développée avec les performances de sportifs mais aussi d’artistes sur la scène internationale. Un mec comme Roméo Elvis, même s’il n’est pas du tout lié à la musique électronique, fait beaucoup de bien aussi parce qu’il fait parler de la Belgique à l’étranger. Un autre aspect dont je suis convaincu, c’est qu’on parle de plus en plus de manger local. Et si tu peux consommer local dans ton assiette, ça marche aussi dans tes oreilles ! »